Messieurs les Ministres,

Le retrait du volet programmatique du projet initial de loi relative à la Souveraineté énergétique (Titre 1er ) appelle à plusieurs commentaires et recommandations conjointes entre France Hydrogène et le Syndicat des énergies renouvelables (SER).

Tout d’abord nous saluons ce retrait s’il est provisoire et vise bien à réintroduire le volet programmatique mais enrichi d’objectifs clairs sur le développement des énergies renouvelables, conformément à la Stratégie française énergie-climat (SFEC).
Nous avertissons en revanche sur l’éventuel risque de renvoyer le volet programmatique à la voie réglementaire. Pour l’atteinte de ses objectifs climatiques et industriels à 2030 et au-delà, la France fait face à un défi électrique majeur, et les relever appelle au dépassement des clivages politiques. Nous sommes en ce sens convaincus qu’il est possible et nécessaire de trouver une majorité au Parlement autour d’une programmation énergétique cohérente, bâtie sur les trois piliers que sont la baisse de la consommation (efficacité et sobriété), assurer la performance opérationnelle et le renouvellement du parc nucléaire, et une forte accélération sur les énergies renouvelables.

C’est notamment à cette condition que la France pourra relever les objectifs figurant dans la proposition de nouvelle Stratégie nationale hydrogène, mise en consultation par le Gouvernement en décembre 2023. Nous saluons l’ambition renouvelée pour le développement d’une filière hydrogène souveraine, fer de lance de la décarbonation de nos industries lourdes ainsi que des transports lourds et intensifs, et vecteur de réindustrialisation des territoires. Le succès de cette Stratégie, tout comme la réussite plus globale de l’effort entrepris pour réindustrialiser le pays de manière décarbonée, tiendra à notre capacité à réaliser le bouclage électrique. L’objectif est une décarbonation rapide de notre production nationale, ainsi que la diminution de nos importations de carbone en relocalisant des activités industrielles. Cela passera par la structuration de nouvelles chaînes de valeur industrielles, dont certaines hyper électro-intensives, notamment la production d’hydrogène renouvelable et bas-carbone pour alimenter la sidérurgie, la chimie ou la production de carburants de synthèse à destination des transports maritime et aérien : ces nouveaux besoins identifiés pour 2030 par les filières utilisatrices apparaissent déjà massifs. Dans un contexte de rivalités industrielles mondiales, la souveraineté industrielle de la France et sa capacité à occuper les premiers rangs de l’industrie verte dépendra de notre capacité à développer rapidement des moyens de production renouvelables et décarbonés additionnels pour répondre à la demande croissante d’électricité.

Dans ce contexte, nous, représentants des industriels de l’hydrogène et des énergies renouvelables, acteurs centraux de la décarbonation, appelons à réintroduire le volet programmatique de la loi Souveraineté énergétique avec notamment les points suivants :

  • Reprendre les objectifs afférents au nucléaire (performance opérationnelle et renouvellement du parc) mentionnés dans le projet de loi initial, qui constitue un socle énergétique indispensable pour le pays.
  • Fixer des objectifs de déploiement des énergies renouvelables électriques supérieurs à ceux proposés dans la SFEC soumise en consultation en décembre, qui apparaissent insuffisants à l’atteinte de nos objectifs climatiques et industriels à 2030 :

– Pour le photovoltaïque, nous devons nous fixer pour objectif de raccorder d’ici la fin de la décennie 10 GW par an, soit plus qu’un triplement du rythme actuel de déploiement, mais réaliste au regard des rythmes tenus par certains de nos voisins européens.

– Pour l’éolien terrestre, la cible actuelle de la Programmation Pluriannuelle de l’Energie doit être conservée à 2 GW par an.

– Pour l’éolien en mer, les propositions figurant dans la SFEC doivent être retranscrites dans ce projet de loi. Il sera par ailleurs essentiel d’intégrer dans le travail de planification des façades maritimes, la production d’hydrogène maritime.

Enfin, France Hydrogène et le SER appellent à porter au plus vite cette loi de Souveraineté énergétique devant le Parlement : le signal sur la disponibilité future de l’électricité en France, doit être envoyé maintenant à l’industrie afin de transformer l’essai des efforts déjà consentis pour la réindustrialisation de notre pays. Ces objectifs, et leur inscription dans la loi, sont indispensables pour réindustrialiser la France.

2030 représente l’horizon crucial pour l’industrie française. De nombreuses pierres ont été posées par le Gouvernement pour relever ce double défi de décarbonation et de réindustrialisation. Nous pouvons et devons désormais transformer l’essai grâce à une programmation énergie-climat en phase avec les besoins et capacités des filières industrielles !