Dévoilé le 15 décembre par la Commission Européenne, le Paquet « gazier » vise à sortir des énergies fossiles et à promouvoir l’hydrogène pour en faire une marchandise comme les autres à l'échelle de l'Union en 2030.

Ce texte fait suite aux annonces du 14 juillet dernier, qui instaurent une réduction d’au moins 55 % des émissions de CO2 d’ici à 2030, par rapport aux niveaux de 1990. Le paquet Fit for 55 favorise la demande et la production de gaz renouvelables et à faible émission de carbone, y compris l’hydrogène. Le Paquet sur le marché de l’hydrogène et du gaz décarboné est une réforme globale, incluant une proposition de révision du règlement 715/2009, ainsi qu’une proposition de révision de la directive 2009/73 concernant les règles communes pour les marchés intérieurs des gaz renouvelables et naturels et l’hydrogène, qui vient en complément de Fit for 55.

Pour développer l’hydrogène, la Commission propose avec ce nouveau Paquet d’introduire une certification de l’hydrogène bas-carbone (qui avait été exclue du Paquet Fit for 55). Elle couvre à la fois l’hydrogène produit à partir de gaz naturel avec abattement des émissions de GES grâce à des techniques de capture, séquestration ou utilisation du carbone (« hydrogène bleu »), mais aussi l’hydrogène produit par électrolyse à partir d’électricité nucléaire ou d’électricité bas-carbone issue d’un mix électrique décarboné (« hydrogène rose » ou « hydrogène jaune »). La directive introduit également au passage une terminologie pour les gaz bas-carbone, entendus comme l’hydrogène bas-carbone, la part gazeuse des carburants à carbone recyclé, et les carburants synthétiques gazeux dérivés de l’hydrogène bas-carbone, ainsi que pour les carburants bas-carbone, définis comme des gaz bas-carbone auxquels s’ajoutent les carburants à carbone recyclé et les carburants de synthèse sous forme liquide.

Le règlement et la directive établissent des règles communes pour un futur marché intérieur de l’hydrogène, et notamment pour les infrastructures de transport, de distribution et de stockage d’hydrogène. Sur le modèle du marché du gaz et du marché de l’électricité, des opérateurs de réseaux d’hydrogène seront responsables de l’opération, de la maintenance et du développement d’un réseau de transport d’hydrogène. Le paquet vise à faciliter l’intégration des gaz renouvelables et bas carbone dans le réseau gazier existant. C’est pourquoi elle propose de garantir l’accès de ces gaz au marché de gros du gaz, de supprimer les coûts des tarifs transfrontaliers facilitant les échanges et de réduire de 75 % les coûts d’injection de ces gaz. En outre, des règles harmonisées sur la qualité du gaz sont proposées, ainsi que l’accès aux terminaux méthaniers et au stockage de gaz pour les gaz à faible émission de carbone et renouvelables. Il existe aujourd’hui plus de 1 600 km de canalisations en opération en Europe appartenant à Air Liquide, Air Products ou Linde, qui relient directement des producteurs d’hydrogène à des consommateurs industriels, dont 303 km en France. Avec ces mesures, la Commission européenne reconnait le rôle des hubs hydrogène locaux.

Le Paquet « gazier » instaure aussi une gouvernance et une planification pour les réseaux européens d’hydrogène. Un Réseau européen des gestionnaires de réseaux d’hydrogène (European Network of Network Operators for Hydrogen – ENNOH) sera créé à partir du 1er septembre 2024, pour assurer la bonne gestion du réseau et des échanges transfrontaliers.  D’ici sa création, une plateforme temporaire sera mise en place par la Commission. Tous les deux ans, l’ENNOH devra soumettre un Plan de développement du réseau d’hydrogène à dix ans, non-contraignant, évaluant notamment l’offre européenne d’hydrogène. La planification des réseaux d’hydrogène suivra un objectif de couplage sectoriel et s’inscrira en lien avec les planifications des réseaux de gaz et d’électricité. Tous les deux ans à partir du 15 mai 2026, l’ENNOH devra publier un rapport sur la qualité de l’hydrogène du réseau.

Les textes évoquent également l’injection d’hydrogène dans le réseau de gaz naturel. Si la Commission européenne ne souhaite pas l’encourager outre mesure, les États membres peuvent choisir d’accepter des taux de mélange d’hydrogène dans leurs réseaux de gaz naturel. Pour limiter les risques de fragmentation du marché, la Commission européenne propose une approche harmonisée au niveau européen sous la forme d’un plafond de 5 % en volume d’hydrogène en mélange avec le gaz, que les gestionnaires de réseaux de transport de gaz seront tenus d’accepter aux interconnexions gazières à partir du 1er octobre 2025 partout dans l’UE.

Enfin, le Paquet applique également un droit des consommateurs à l’hydrogène, allégé en raison de la nature des consommateurs de type entreprises ou collectivités territoriales. Tous les clients doivent être libres d’acheter de l’hydrogène au fournisseur de leur choix et avoir accès à plus d’un fournisseur d’hydrogène en même temps. Des factures seront établies au moins tous les six mois et avec des informations sur les émissions, les comparaisons de coûts et les informations visant à faciliter le changement de fournisseur. Par ailleurs, des compteurs intelligents d’hydrogène doivent être déployés pour permettre de mesurer avec précision la consommation, de fournir des informations sur le temps réel d’utilisation et de transmettre et recevoir des données à des fins d’information, de suivi et de contrôle, par voie électronique.