Dans le cadre d'un webinaire, France Hydrogène a présenté une étude sur les écosystèmes portuaires. Par la densité de leurs activités, ces zones s'affirment comme des lieux privilégiés pour accélérer le déploiement massif de la filière hydrogène. Et ce vecteur d'énergie est un moyen de répondre à leurs enjeux de décarbonation, de diversifier leur économie et de renforcer leur attractivité. Thomas Gauby, chargé de mission à l’association, fait le point sur cette étude.

Comment est venue cette idée ?

La démarche a été lancée il y a plus d’un an. Nous avons lancé des contacts auprès de nos membres et au-delà. L’idée était de valoriser le retour d’expérience des ports de Nantes et de Saint-Nazaire, associés à notre étude. En tout, 7 autorités portuaires ont accepté de nous rejoindre. Cela représente une quinzaine de sites avec la Bretagne, les Hauts-de-France, Haropa (Le Havre-Rouen-Paris), Lyon, Marseille, Sète et Strasbourg.
Ces zones représentent une grande diversité, en matière de taille, de façade (fluviale ou maritime), mais aussi en termes d’activité. Il existe par exemple des ports plutôt industriels, avec du raffinage d’ammoniac ou de la production d’acier, d’autres étant plus axés sur la mobilité.
Pour réaliser cette étude, qui est un travail prospectif, nous nous sommes appuyés sur l’expertise des réseaux locaux et territoriaux.

Avez-vous pris en considération les applications maritimes ?

On a regardé aussi cet aspect, car on se dirige vers des ferries à hydrogène, aussi bien dans le sud de la France qu’en mer du Nord. Si l’on prend l’exemple de Calais, c’est l’un des plus gros points de passage en Europe. Potentiellement, ce port pourrait produire plusieurs milliers de tonnes d’hydrogène par an. Mais, les ports ont davantage été pris en compte comme un hub global. Ils cumulent à la fois de la mobilité terrestre et ferroviaire, et ouvrent sur des applications dans l’énergie et l’industrie.

Et quels enseignements en tirez-vous ?

L’étude a confirmé l’intuition que les ports étaient des écosystèmes en puissance, à l’échelle nationale ou sous forme de bassins. Ils peuvent potentiellement produire plusieurs milliers de tonnes d’hydrogène par an et alimenter ainsi des usages en industrie et en mobilité. Selon les hypothèses retenues, les ports pourraient produire entre 220 et 615 000 tonnes par an. Soit, entre 35 et 55 % des objectifs de consommation évalués dans le cadre de l’étude Ambition 2030 (selon qu’on se cale sur les 680 0000 tonnes par an du scénario Ambition ou les 1 090 tonnes du scénario Ambition+). Ces écosystèmes sont également de gros consommateurs. Ils voient passer beaucoup de camions et même des trains, ce qui peut créer un effet corridor pour les stations de remplissage. Les ports peuvent donc aider à passer à l’échelle. Il existe un calendrier de phasage qui vise 2030. Mais le besoin de financer ce déploiement se traduit dès aujourd’hui. C’est maintenant qu’il faut tester des solutions et montrer que ça marche.

Quelles sont les recommandations de l’étude pour développer ces écosystèmes ?

On peut les classer en grandes thématiques : financer le déploiement par des grands projets d’infrastructure ; réaliser des démonstrateurs dès aujourd’hui ; mettre l’accent sur l’innovation ; avancer sur la réglementation (prise en compte des décisions de l’OMI, accompagnement des acteurs) ; et enfin jouer les synergies territoriales. Il est clair que les ports représentent de gros hubs qui peuvent également produire pour les collectivités. C’est une opportunité que nous allons essayer d’amplifier en intégrant de nouveaux ports à l’étude. Nous discutons par exemple avec le GPM de Bordeaux, le Port de Toulon, les Ports de Mulhouse, ou encore la Communauté portuaire Seine Aval.