Trois ans après la publication de la Stratégie nationale hydrogène, sa révision en cours est l’occasion de faire le point sur les efforts entrepris, ainsi que sur les besoins et points de vigilance à horizon 2030.

Il faut tout d’abord se féliciter des avancées notables dans le déploiement des capacités manufacturières et de plusieurs écosystèmes hydrogène sur notre territoire, notamment autour de la mobilité routière. Au plan européen, l’hydrogène est reconnu comme industrie stratégique et fait l’objet d’un IPCEI*, dont deux vagues de projets ont dès à présent été publiées. Pour la première, relative aux composants et équipements-clés, dix projets français (sur 41) ont été retenus, permettant de démarrer la construction de giga-factories d’électrolyseurs, de piles à combustible et de réservoirs, dont l’une a déjà été inaugurée. Au niveau national, l’État concrétise son soutien à la production d’hydrogène décarboné avec l’affectation de 4 milliards d’euros** au déploiement d’un gigawatt d’électrolyse d’ici 2026.

Ces avancées indéniables ne peuvent masquer de nombreux retards dans les prises de décision. Au-delà de l’inflation et des problèmes d’approvisionnement, la consultation de la filière effectuée dans le cadre de la révision de la Stratégie permet de mettre en lumière des raisons structurelles de ce retard, parmi lesquelles une insuffisante stimulation de la demande et le manque de visibilité qui pénalisent l’engagement des acteurs.

Il convient ici de souligner la trop lente structuration du cadre réglementaire et législatif en France et en Europe, dans un contexte où les géants états-uniens et chinois mettent tout en œuvre pour soutenir leurs champions. Les récents progrès
accomplis par l’Union européenne dans la reconnaissance de l’électricité nucléaire comme source de production d’hydrogène bas carbone, ainsi que les avancées dans la réforme du marché européen de l’électricité devraient néanmoins permettre d’accélérer dans la production d’hydrogène. Une production qui nécessite à 2030 une puissance d’électrolyse de 6,5 gigawatts, objectif initial de la Stratégie nationale confirmé dans le cadre des études de besoins menées depuis le début de l’année.

La révision de la Stratégie nationale hydrogène constitue une formidable opportunité de transformer l’essai des jalons posés depuis trois ans, en ayant conscience des temporalités. Déployer les équipements et infrastructures demande du temps, des délais qu’il s’agit de réduire au maximum, dans cette phase d’accélération nécessaire pour lutter contre le changement climatique.

Au-delà, l’alliance décarbonation-réindustrialisation qui fonde la raison d’être de notre filière doit se déployer sans restreindre l’ambition initiale : favoriser tous les usages de l’hydrogène, qui seront créateurs de valeur et d’emploi sur nos territoires.
Une ambition portée par la mobilisation d’investissements privés et par un soutien public renouvelé. Ensemble, au service de la transition écologique et de notre souveraineté énergétique et industrielle futures.

*Important Project of Common European Interest qui autorise les États membres à des financer des initiatives au-delà des limites habituellement fixées par les règles européennes de la concurrence.

** sur les 9,2 milliards promis à la filière d’ici 2030.

Philippe BOUCLY – Président de France Hydrogène